Les écoles d'ingénieurs et de commerce séduisent depuis longtemps les jeunes, avec la promesse d'une formation de qualité, adaptée au marché du travail et donnant accès aux meilleures opportunités de carrière.
Si le diplôme reste incontestablement déterminant dans le marché français, les réalités de l'emploi sont souvent bien plus complexes et disparates selon les domaines d'études, les métiers accessibles, les régions visées, les types d'organisations, etc.
Que révèle l'observation du marché du travail sur ces diplômes ? Dans quels cas font-ils la différence ? Quels métiers recrutent actuellement les ingénieurs vs les managers ? Pour quels rôles un double diplôme vaut-il la peine ? Quid des salaires ? Qu'en est-il de la crise ?
Dans cet article, nous tentons d'apporter des éléments de réponses tangibles grâce à notre analyse réalisée sur près de 7M offres d'emploi uniques au cours des 6 derniers mois (précédant le 1er février 2020).
Méthodologie et macroanalyse
Afin d'analyser et comparer la tendance des diplômes dans les offres d'emploi, en zoomant de façon granulaire sur les métiers, les domaines, les secteurs d'activité, etc., nous nous sommes penchés sur les données de plus de 7M offres d'emploi uniques publiées en ligne depuis la survenue de la crise, en exploitant à la fois la normalisation* par nos intelligences artificielles, qui a permis d'analyser et harmoniser les intitulés de postes et les compétences selon le référentiel ROME (au niveau OGR), ainsi qu'une taxonomie spécialisée pour filtrer les métiers et compétences spécifiques pertinents.
Nos algorithmes ont évalué ensuite les pourcentages d'offres explicitant un type de diplôme par rapport au total des offres ciblant un niveau d'étude entre bac+3 et bac+5.
*la normalisation est une tâche effectuée par nos intelligences artificielles visant à catégoriser les éléments d'une offre d'emploi selon un référentiel métiers/compétences.
Les offres d'emploi ciblant les bac+3 à bac+5 représentent près de 10% des offres disponibles actuellement sur le marché (durant les six derniers mois). Parmi ces offres destinées aux bac+3/5, ce sont 18% qui explicitent un diplôme d'école d'ingénieurs ou de commerce (2% précisent une Grande Ecole), dont 1% qui recherchent des profils double diplômés.
Métiers concurrentiels aux compétences rares : avantage pour les diplômes
Deux facteurs peuvent expliquer les stratégies des recruteurs quand ils semblent favoriser une sélection axée, entre autres, sur le diplôme, et ciblant notamment les écoles d'ingénieurs et de commerce. C'est le cas, d'une part, des métiers concurrentiels (à faible tension) comme l'audit comptable, le contrôle de gestion ou le développement commercial.
D'autre part, les offres qui insistent sur le diplôme ont la caractéristique commune de rechercher des compétences (transverses et spécialisées) moins fréquentes dans l'offre (compétences des candidats). Par exemple, les chefs de projets informatiques ciblés par ces annonces ont besoin à la fois de compétences techniques, d'analyse, de coordination et de communication. Les écoles d'ingénieurs et de commerce constituent à ce titre le meilleur Proxy des recruteurs afin d'assurer cette polyvalence rapidement et à moindre coût.
Salaires : malgré la crise, les diplômes maintiennent l'écart
En moyenne, les offres ciblant les diplômes d'écoles d'ingénieurs ou de commerce affichent un premium de salaire de +38% par rapport aux autres offres ouvertes aux bac+3 à bac+5. Si on ne considère que les niveaux bac+5, le premium de salaire est de +25% en moyenne. Pour les débutants, l'écart se réduit à +13%.
En d'autres termes, cela veut dire qu'un diplômé d'une école d'ingénieurs ou de commerce peut espérer gagner, à la sortie de l'école, un salaire augmenté de 13% par rapport au salaire moyen sur le marché pour la même catégorie (bac+5 débutant).
Ecoles d'ingénieurs vs Ecoles de commerce : des métiers différents, mais aussi des profils qui convergent
Les recruteurs recherchent les diplômés d'écoles ingénieurs principalement dans le milieu informatique (gestion de projet, développement, sécurité informatique, etc.), dans l'industrie (production, maintenance, QHSE, etc.), ainsi que dans le BTP et les infrastructures.
En cette période de crise, il parait que les recruteurs se rabattent sur les diplômes d'écoles d'ingénieurs pour combler les besoins en lien avec ces métiers techniques fondamentaux, qui ont notamment été accentués ces derniers mois.
Les diplômés d'écoles de commerces sont quant à eux le plus recherchés pour les métiers de développement commercial, d'audit financier et de gestion de projet/produit, sans oublier les RH, le marketing et le conseil en management. Les métiers qui recrutent ces profils sont globalement moins concentrés que les métiers d'ingénieurs, ce qui laisse plus de choix d'orientation aux étudiants évoluant dans ces écoles. En revanche, un parcours en école de commerce pose plus de difficultés en matière d'information et d'orientation pour les jeunes et les établissement d'enseignement.
Nous observons par ailleurs certains métiers qui font appel à ces diplômés d'écoles d'ingénieurs ou de commerce sans les différencier, ou qui privilégient parfois les doubles diplômes. Il s'agit par exemple de la gestion de produits digitaux, du management des SI ou encore de l'analyse décisionnelle.
Ces métiers nécessitant souvent une double compétence ainsi qu'une forte polyvalence analytique sont aujourd'hui accessibles aux deux types de profils, et reflètent la convergence de certains programmes enseignés dans les écoles d'ingénieurs et de commerce.
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